Lutter contre les maladies transmissibles de l’animal à l’homme

On les appelle les maladies zoonotiques. Elles se transmettent des animaux aux humains, et représentent une menace croissante pour la santé publique.

À Sénou, près de l’usine Bramali, nous rencontrons une famille nomade qui vit de l’élevage transhumant d’animaux. Si cette activité est indispensable pour la nourrir et lui procurer ses revenus, on s’aperçoit en discutant avec le chef de famille, Moussa Diallo, qu’il ignore tout des conséquences de la proximité entre les hommes et les animaux, et comment celle-ci favorise la propagation de maladies transmissibles, telles que l’anthrax, la tuberculose ou la brucellose : « nous passons presque toute la journée avec les animaux. Je n’ai jamais entendu parler d’une maladie semblable chez mes enfants ».

Un bâton à la main, M. Diallo dément catégoriquement que des animaux, comme les chats, puissent être une source de contamination de maladie. Pourtant, la rage est une zoonose grave qui sévit dans la plupart des pays en développement. Elle est transmise généralement par un chien enragé, mais exceptionnellement le chat peut être la source de la contamination de la maladie

Pourtant, Gilles Salvat, directeur scientifique de la santé et du bien-être animal à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES/France), confirme que 60% des maladies infectieuses actuelles chez l’humain sont des zoonoses. On ne peut donc pas traiter la santé humaine sans se préoccuper de la santé animale et vice versa.

L’organisation mondiale de la santé (OMS) a établi à ce propos que les personnes vivant à proximité de zones sauvages ou dans des zones semi-urbaines, où le nombre d’animaux sauvages est plus élevé, sont exposées au risque de contracter des maladies transmises par des animaux tels que les rats, les renards ou les ratons laveurs. « L’urbanisation et la destruction des habitats naturels accroissent le risque de zoonoses en augmentant le contact entre les humains et les animaux sauvages », précise l’OMS. L’organisation indique que 60% des maladies infectieuses humaines sont zoonotiques et que les zoonoses sont responsables chaque année d’au moins 2,4 milliards cas de maladies humaines et de 2,2 millions de décès.

« Une seule santé »

Au Mali, où les liens entre les humains, les animaux et l’environnement sont étroits, le projet « Une Seule Santé » se révèle prometteur pour prévenir et contrôler ces maladies. Julian Blanc, expert de la vie sauvage au sein du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), définit « Une Seule Santé » comme une approche transversale qui met en œuvre des programmes, des politiques, des législations et des recherches, dans lesquels différents secteurs travaillent ensemble pour obtenir de meilleurs résultats en matière de santé publique.

Le programme « Une Seule Santé » se concentre sur le lien entre la santé humaine et la santé animale, y compris les zoonoses et la résistance antimicrobienne, lorsque l’exposition aux antibiotiques modifie les bactéries, les rendant plus difficiles à traiter.

Les trois composantes de l’initiative – santé humaine, animale et environnementale – ne peuvent être dissociées et nécessitent toutes une attention urgente, souligne Julian Blanc. « De nombreuses zoonoses qui sont devenues des pandémies ont été liées à des facteurs environnementaux tels que la déforestation, et sont exacerbées par les changements climatiques. Nous ne parviendrons pas à garantir la santé humaine si nous continuons à ignorer la santé environnementale », assure-t-il.

Le Mali est confronté à plusieurs défis dans la prévention des maladies zoonotiques, tels que le manque d’infrastructures de santé adéquates, de ressources financières et humaines suffisantes, ainsi que des problèmes de coordination entre les différents acteurs. Cette initiative est donc une chance pour affronter un grand problème de santé publique.

Tidiane BAMADIO

Cet article a été publié dans le périodique Le Hogon, le 26/08/2023

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