Période de chaleur : les appareils de froid à rude épreuve

Il est très difficile de se passer des ventilateurs, climatiseurs, ou humidificateurs en période de canicule. Les réparateurs de ces appareils électroménagers sont très sollicités. Les rapports avec les clients peuvent être tendus…

Lassana Camara, technicien en froid, est à la tâche dans son atelier à Kalaban-coro. Il remet en place, avec dextérité, les pièces d’un humidificateur qu’il a dû démonter pour situer et corriger le problème l’empêchant de fonctionner correctement. Le propriétaire de l’appareil suit avec attention les gestes du technicien, espérant qu’il est tombé cette fois-ci sur le bon. « Il y a une semaine, j’avais amené ce même refroidisseur chez un soi-disant réparateur qui m’a fait dépenser pour rien. Enervé, j’ai tenu à son endroit des propos discourtois et on a failli en venir aux mains», dit-t-il.

Devant l’atelier de Lassana Camara, des dizaines d’autres humidificateurs attendent d’être réparés. Il doit, en plus, se déplacer fréquemment pour des besoins de réglage, de dépannage ou de maintenance de climatiseur au domicile de ses clients. Comme lui,  bon nombre de réparateurs d’appareils de climatisation sont débordés en cette période de chaleur suffocante à Bamako.

Les ventilateurs, climatiseurs, humidificateurs et autres appareils du genre sont ainsi d’un grand secours. Sauf que leur usage réserve parfois des surprises désagréables. Et le « stress thermique » aidant, les échanges entre techniciens et leurs clients peuvent devenir abrupts !

Métier non maîtrisé !

Les seconds pointent du doigt le manque de professionnalisme des premiers. «Beaucoup d’entre eux font du tâtonnement. Et ceux qui se débrouillent bien respectent rarement les délais», tance l’instituteur Amadou Traoré. Fadima Cissé, elle, estime s’être fait gruger plusieurs fois, par des «techniciens incompétents». Récemment, cette résidente d’un quartier de la rive droite de Bamako a sollicité, en l’espace de dix jours, deux réparateurs. On lui avait particulièrement vanté les «qualités du premier». Mais à l’épreuve, il a échoué.

«Il m’a dit que le problème était lié à la destruction de la carte et de l’interrupteur du climatiseur. Il a changé ces pièces, mais le même problème est réapparu une semaine après», confie notre interlocutrice, alors obligée de contacter un autre électricien. Celui-ci a lavé les filtres et mis du gaz pour un montant de 12.500 Fcfa. « Attendons de voir pendant combien de jours, la machine va tenir», soupire-t-elle.

Selon Fadima Cissé, tous les réparateurs n’ont pas la maîtrise de leur métier. Ainsi, elle est obligé de recourir, à chaque dysfonctionnement de son appareil, à 2 voire 3 réparateurs pour trouver une solution. Et pour chaque réparation, surtout en cette période, il faut débourser une petite fortune.

Awa Soumaoro utilise un humidificateur depuis trois ans. Cette résidente de Sébénikoro n’est jamais à l’abri des réparations pendant la canicule. Il y a deux semaines, elle a sollicité les services d’une entreprise spécialisée pour que son humidificateur retrouve son rythme normal de fonctionnement. «Un technicien a changé certaines pièces. La réparation m’a coûté 7.500 Fcfa. Heureusement, ça a marché», affirme-t-elle. Ce que la sexagénaire trouve surtout de séduisant chez ce réparateur-ci, c’est que le «client peut l’interpeller s’il n’est pas satisfait de la prestation». Il prodigue aussi toujours des conseils utiles pour la bonne tenue des appareils.

Hamidou Traoré, technicien en froid et climatisation, concède le déficit de réparateurs qualifiés. Mais, se presse-t-il d’ajouter, il y a de ces utilisateurs qui «disent souvent que les réparateurs ne connaissent rien alors que ce sont eux-mêmes qui ne savent pas manipuler leurs appareils». Pour preuve, le diplômé de l’Institut supérieur de technique de gestion (ISTG) raconte : «Je viens tout de suite de régler un climatiseur que j’avais déjà réparé, il y a une semaine. Le propriétaire était sur les nerfs quand il m’informa de ce qu’il croyait être une nouvelle panne. Alors que le problème était dû à la mauvaise manipulation de la commande par les enfants. Après mon intervention, j’ai exprimé mon mécontentement».

Hamidou Traoré venait donc de subir «injustement», selon lui, et pour la énième fois, le courroux d’un client. Sans compter la perte de temps causée par cette intervention à domicile. «En cette période, le temps est précieux pour nous», dit-il, révélant qu’il répare 4 à 5 appareils par jour. En moyenne, il gagne 15.000 Fcfa par jour. Le technicien conseille aux clients d’acheter un humidificateur en fonction de la dimension de la pièce où il doit être installé et de ne surtout pas le laisser à la portée des enfants.

Contrairement à Hamidou, Seydou Konaré a appris le métier sur le tas. Démontant un ventilateur dans son atelier à Bamako-Coura, il nous explique comment il est devenu réparateur : «Pendant les vacances, je partais dans des ateliers pour gagner de l’argent. J’ai fini par aimer ce travail passionnant. Cela fait 15 ans maintenant que j’évolue dans ce domaine.» Et d’affirmer qu’il n’a jamais eu de problème avec les clients, même durant les périodes de canicule où le volume de travail devient très important. « Nous pouvons réparer plus de 4 humidificateurs par jour. Le marché est vraiment rentable en ce moment», se réjouit-il.

COUPURES D’ÉLECTRICITÉ

De son côté, Beydi Diallo, diplômé en électricité et en froid, évoque la rareté de pièces de rechange de bonne qualité sur le marché. Et avec la crise économique qui n’épargne aucun pays, les prix des pièces de qualité (mèches, pompes, multimètres, filtres déshydrateur…) trouvées au marché Dabanani ou dans les quincailleries ont connu une augmentation de 500 à 1.000 Fcfa. C’est pourquoi, les réparateurs utilisent très souvent à la demande des clients, des pièces moins chères, donc peu résistantes.

Beydi quitte rarement son atelier, situé à Bolibana, où il répare des ventilateurs, des groupes électrogènes, des frigos, fours et repasseurs. «De mars à mai, je reçois plus de clients», dit-il, ajoutant que ceux-ci sont généralement satisfaits de la qualité de ses prestations. «Mais dans tous les métiers, il peut y avoir des erreurs. Les clients sont libres de ramener les machines si leurs attentes ne sont pas comblées et la réparation est reprise gratuitement», affirme Beydi Diallo qui note, au passage, les dommages causés aux appareils par les coupures intempestives d’électricité. Il recommande l’usage des stabilisateurs pour éviter aux appareils de subir directement les coupures et la baisse de tension.

L’entreprise Niaré Froid est, elle, très connue pour ses services d’entretien et de maintenance. Selon son directeur technique, il est important de faire le suivi et la maintenance curative et préventive des appareils. Mohamed Touré invite donc les clients à faire l’entretien de leurs matériels tous les 3 ou 6 mois et de se référer, en cas de panne, à une entité ayant des compétences reconnues.

Fatoumata Mory SIDIBE

Ce reportage a été publié par l’Essor du 24 mai 2023

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