Tendances : la folie du IPhone

Sont-elles vraiment prêtes à tout pour exhiber un IPhone pendant une cérémonie de mariage ou un baptême ? Ces divers témoignages semblent le confirmer : le IPhone turne la tête des Bamakoises !

Il est 10 heures ce dimanche matin dans le salon de coiffure de M’Mah Diakité, Rama est venu se faire tresser. Assise sur un fauteuil, traitée en reine sous un tube de l’artiste Sidiki Diabaté, elle cause avec sa voisine. Soudain, la sonnerie reconnaissable d’un iPhone attire l’attention de tous. Pourtant, le téléphone qu’elle exhibe, s’il est dans une pochette au sigle Apple (une pomme mâchée), n’est pas un IPhone… on voit qu’il s’agit d’une autre marque et les copines de la jeune Rama, qui l’ont accompagnée, se moquent d’elle. « Alors, comme ça, tu n’as pas les moyens d’acheter un IPhone, mais tu triches. Arrête ça, ne fais pas ta complexée ! »

En réponse, la jeune étudiante en gestion de ressources humaines qu’est Rama avoue : elle veut évoluer avec son temps. « Hé, ce n’est pas moi seule ! J’ai plusieurs de mes camarades de classe qui font pareil… »

Hawa Dramé, elle aussi étudiante, possède un IPhone 6 en mains (un vrai). Cette future ingénieure a déboursé la moitié de sa bourse pour avoir la marque de Cupertino, dont elle rêvait tant. « J’ai acheté cet Apple dans le but de faire mes recherches, travailler avec sans aller dans les cybercafés. Mon IPhone est mon matériel de travail et mon mini-ordinateur ! », souligne-t-elle.

On doit les croire : casser sa tirelire pour un IPhone ne serait pas sans bénéfice. Exemple de Youssouf Keita : « Mon IPhone me permet aujourd’hui de me faire de l’argent, raison pour laquelle j’ai beaucoup économisé avant de pouvoir l’acheter », révèle-t-il. Lui possède un Iphone 12, est suivi aujourd’hui par des milliers de followers sur la toile, sur Tiktok et Instagram. Ce jeune père de famille prend photos et vidéos, postées chaque jour sur les réseaux sociaux, et multiplie les « posts » proposant conseils et astuces sur la santé.

Ousmane Sakho est amer. Si on en croit le jeune homme, les jeunes filles d’aujourd’hui sont prêtes à tout pour avoir cet appareil de luxe. D’ailleurs sa copine l’a quitté pour une histoire d’IPhone (dit-il)… aujourd’hui elle possède un de ces appareils « dernier ‘cri’’, et pourtant ses parents n’ont pas beaucoup de moyens.

Aurait-il raison ? Une de nos interlocutrices confie qu’elle possède à ce jour deux IPhone, donnés par ses copains. « Je suis prête à tout pour avoir ce que je veux. Les IPhone me permettent juste de prendre des belles photos et vidéos ou faire des « Snap » et les poster pour de la visibilité sur mes différents comptes », raconte Amina.

« Un téléphone, c’est fait pour téléphoner !« 

Anta, une vendeuse de pagnes que nous rencontrons au marché de Bamako, montre qu’elle a l’esprit bien plus pratique :   même si une personne de bonne foi lui donne gratuitement la somme d’un Iphone, elle ne l’achèterait jamais, dit-elle. Car un téléphone « c’est uniquement pour faire des appels » et un simple modèle à 5.000 Fcfa peut faire son affaire ! 

Aux cérémonies de mariages à Bamako, les femmes se guettent entre elles : celles qui ont des iPhone concentrent l’attention, car avec elles on peut demander de prendre de belles photos… La folie IPhone est telle qu’on trouve désormais sur les réseaux sociaux des entreprises qui proposent de louer un IPhone le temps d’une cérémonie de mariage, d’un baptême ou anniversaire, etc. Par jour, le prix est entre 2.000 et 5.000 Fcfa, selon les modèles. Les clients ? Ce sont des clientes, en majorité, indique un de ces loueurs, contacté sur sa page. Les jeunes filles louent le téléphone pour la qualité des photos, qu’elles adorent publier sur les réseaux.

On a trouvé une entreprise, « Nefurula », qui organise des cérémonies de mariages à un moindre coût. Pour attirer le client, sur leur catalogue elle offre des cadeaux aux couples à la fin de la cérémonie, parmi lesquels figure un téléphone IPhone 6 de 64 Go. Questionné, un responsable de l’entreprise nous dit que l’IPhone est très attractif, et considéré comme un objet de luxe.

Dans son point de vente Apple, à ACI 2000, Abdoulaye Traoré reçoit par jour plus d’une trentaine de jeunes désireux d’acheter un IPhone. Selon ce chef de famille, deux critères principaux pour les clients(es) : la qualité de l’appareil photo, et la durée de vie de la batterie. Tout ceci a un coût : entre 300.000 à 600.0000 Fcfa, selon les modèles.

Fadi Cissé

(Cet article a été publié par l’Essor le 19 janvier 2022)

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